La mémoire dans l'apprentissage du krav maga

Krav maga : les trois étapes de la mémoire

Comme toutes pratiques le krav maga fait appel aux trois étapes de la mémoire : l’encodage, le stockage et le rappel. L'apprentissage est un changement permanent des comportements qui marque des acquisitions de connaissance, de compréhension ou de compétence grâce aux souvenirs mémorisés. La mémoire est la résultante de cet apprentissage, l’empreinte concrète qui en est conservée dans les réseaux de neurones de notre cerveau. Suivre des cours de krav maga est une chose, mais comprendre comment cela fonctionne pour pouvoir apprendre mieux en est une autre.  

La mémoire humaine est fondamentalement associative. Nous associons mieux lorsqu’il nous est possible de  relier les nouvelles informations à des connaissances déjà acquises et fortement fixées dans notre mémoire. D’où l’importance dans un premier temps d’une bonne mémorisation des fondamentaux (1) du krav maga.

L'encodage

L'encodage est la capacité d'acquérir de nouvelles informations en provenance de nos cinq sens : la vue, l'ouïe, le toucher, l'odorat, le goût. Ces informations sensorielles sont en permanence traitée pour être mises en mémoire. Ce processus de traitement de l’information consiste à convertir des informations pour les rendre compatibles. Le codage correspond à la phase d’acquisition des informations. Plus l’apprenant mettra en place de stratégies de mémorisation lors de l'encodage et plus il parviendra à obtenir à un apprentissage efficace. L’attention, la concentration portée à la mise en mémoire mène à une mémorisation durable et performante.

Théorie du double codage

Issue des travaux du Professeur Allan Paivio (2) à la fin des années 60, la théorie du double codage estime que le code imagé est d'autant plus utile que la personne doit traiter des éléments concrets. La communication verbale était plus efficace dans le traitement des informations de situations abstraites..

Le Professeur Allan Paivio a d'abord montré que des mots concrets ont une plus grande probabilité de susciter une image mentale que les mots abstraits, ce qui a permet d'établir des normes d'imagerie pour les mots. Lorsque les sujets de l’étude devaient mémoriser des mots, il apparaissait  que le rappel était meilleur pour les mots concrets que pour les mots abstraits. L'interprétation qui a été faite de ces résultats est de supposer que les mots concrets ont subi un double codage (imagé et verbal) qui facilite le rappel comparativement aux mots abstraits qui n'ont été codés que verbalement.

Les études comparant la mémorisation des images par rapport à la mémoire des mots apportent des preuves supplémentaires en faveur de cette théorie. Dans une expérience de R. Ducharme et P. Fraisse de 1965 (3), les auteurs ont comparé les conditions suivantes : présentation de dessins, présentation de dessins + dénomination, présentation de mots. La résultante a été que la mémoire des sujets de l’étude dans les conditions dessins + dénomination et dessins seuls est équivalente, mais supérieure à la situation des mots seuls. Les dessins suscitent donc les mots et sont codés de façon imagée et verbale. Il en a été déduit que les images ont la plus forte probabilité d'être codées doublement, suivies des mots concrets alors que les mots abstraits ne seraient codés que de façon verbale.

L’encodage et l’attention

L’attention peut prendre de multiples formes. Certaines personnes sont capables de se concentrer facilement, alors que le bruit du vent suffit pour en perturber d’autres. Certaines personnes mémorisent facilement alors que d’autres ne se souviennent qu’au prix de gros efforts de répétition.

Il existe indubitablement un lien entre un encodage efficace et la concentration de l’apprenant. Répondre à ces questions en apparence simples constitue un défi sur lequel les scientifiques n’ont pas encore terminé d’étudier, tellement le sujet est vaste. Les activités humaines sollicitent à tout moment nos processus attentionnels. La réussite de plusieurs de nos activités quotidiennes dépend de notre capacité à ignorer les stimuli environnants. Dans toutes ces activités, l’être humain met en action différents types d'attention :

  • l'attention sélective ;
  • l'attention soutenue ;
  • l'empan attentionnel (*) ;
  • la résistance à l'interférence ;
  • la manipulation mentale.


Le stockage

Dès lors que l'information est mise en mémoire, il faut pouvoir la stocker et la faire perpétuer dans le temps. Dans le cerveau humain le stockage est le maintien dans le temps des informations apprises. Il existe de nombreuses stratégies pour faciliter l'encodage. Une des stratégies fréquemment utilisée pour améliorer le stockage en mémoire est la consolidation. La consolidation renvoie à la période durant laquelle le cerveau va répéter automatiquement, sans que l'on s'en rende compte, une information jusqu'à ce qu'elle soit suffisamment ancrée dans notre mémoire pour être retenue pendant longtemps.

La consolidation

La consolidation est le transfert continu d'informations entre la mémoire de travail et la mémoire à long terme. La consolidation systémique (**) de la mémoire et des souvenirs ne s’acquière pas dans leur forme définitive. Une mémoire récemment acquise est initialement instable, sensible aux interférences et à l’oubli. Cette mémoire doit subir un processus dit de consolidation des fonctions perceptives qui lui confèrent une stabilité et une persistance dans le temps (4). En neurosciences cognitives, le terme de consolidation systémique se définit par la réorganisation progressive des circuits neuronaux qui participent à la formation de la mémoire à long terme. Ce processus peut s’étendre sur des jours, des mois, voire des années. Selon les théories actuelles, la stabilisation et la conservation des souvenirs seraient dépendantes d’une interaction temporaire entre la formation des capacités de l’hippocampe et différentes régions corticales dépositaires des souvenirs (5-6). Au cours de ce dialogue, l’hippocampe serait capable, grâce à ses fortes capacités associatives, de réactiver, au cours des périodes de repos ou de sommeil, les différents modules qui ont participé à l’encodage de l’information (6, 7). Malgré que l’existence du dialogue entre l’hippocampe et différentes régions corticales dépositaires des souvenirs soit largement admise, les mécanismes neurobiologiques restent encore méconnus.

La consolidation et le sommeil

Bien apprendre le première fois, réactiver la nuit suivante, bien réapprendre les autres fois. Une trace mnésique est dans un premier temps bien stabilisée par un bon encodage initial. En krav maga l’encodage est favorisé par une bonne attention, concentration et une analyse en profondeur des  techniques à enregistrer permettant de les comparer à ce qui est déjà acquis. Il a été démontré que la consolidation d’une trace mnésique fraîche commence dans l’heure qui suit le premier apprentissage. Le sommeil favorise la consolidation à long terme sous forme d’une réactivation des circuits neuronaux impliqués lors de l’apprentissage pendant la journée précédente. Le lendemain, les performances des sujets seront directement proportionnelles à l’importance de l’activité de l’hippocampe pendant le sommeil.

Une fenêtre optimale, mais variable selon chaque personne est nécessaire entre des réapprentissages. Pour cette raison, des techniques ou d’autres informations seront d’autant mieux consolidées et donc plus rapidement retrouvées sur des informations récemment et régulièrement utilisées. Visualiser mentalement fréquemment un savoir revient à les réapprendre.

Le rappel

Le rappel ou la récupération se réfère au processus qui permet à une information d'être extraite de la mémoire. Cette capacité permet de restituer une information auparavant apprise. Les stratégies mises en place pour un bon encodage vont aider à retrouver l'information et sont donc décisives dans les processus de récupération des informations en mémoire.

Conclusion

Pour mémoriser efficacement, l’essentiel est de prendre plaisir en apprenant et d’avoir un cycle de sommeil adapté.

Sources

(1) Atkinson R. C. & Shiffrin R. M. (1968). Human memory : A proposed system and its control processes. In KW Spence and JT Spence (Eds.), The Psychology of Learning and Motivation : Advances in Research and Theory (Vol. 2, pp. 89-195). New York : Academic Press.
(2) Paivio, A. (1969). Mental imagery in associative learning and memory. Psychological Review
(3) Ducharme, R., & Fraisse, P. (1965). Étude génétique de la mémorisation de mots et d’images. Canadian Journal of Psychology/Revue Canadienne de Psychologie
(4) Dudai Y. The neurobiology of consolidations, or, how stable is the engram? Annu Rev Psychol 2004
(5) Buzsaki G. The hippocampo-neocortical dialogue. Cereb Cortex 1996
(6) Wang SH, Morris RG. Hippocampal-neocortical interactions in memory formation, consolidation, and reconsolidation. Annu Rev Psychol 2010
(7) Wittenberg GM, Sullivan MR, Tsien JZ. Synaptic reentry reinforcement based network model for long-term memory consolidation. Hippocampus 2002
Les étapes de la mémorisation
listes.u-picardie.fr
Effets de l'implémentation d'intention sur la persistance des comportements
tel.archives-ouvertes.fr
(*) Correspond au nombre d'éléments visuels distincts qui peuvent être traités simultanément dans une configuration de plusieurs éléments.
(**) Approche scientifique des systèmes qui s'oppose à la démarche rationaliste en abordant tout problème comme un ensemble d'éléments en relations mutuelles.
Hélène Poissant, Université du Québec à Montréal
https://uqam.ca

 

03/01/2018


Krav maga : que faire en cas d'attaque au couteau ?

Que cela soit en krav maga ou tout autres systèmes de défense, comment se défendre contre une menace au couteau n'est déjà pas...

Krav maga : que faire en cas d'attaque au couteau ?

Comment bien se defendre dans la rue

Comment bien se défendre dans la rue reste une préoccupation majeure pour beaucoup. Est-ce vraiment dans la rue...

Comment bien se defendre dans la rue